VOLVO 780 ET 26C

Les Belles américanes






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Tout comme la 262C, la Volvo 780 est en marge de temps et de la mode.
Pour elle, le changement se fait dans continuité
et comme sa devancière, elle préfère le luxe au brio.
10 ans après la 262C, qu'apporte la 780 ? Une jolie robe ?

histoires03 Al'instar de Saab autre constructeur suédois, Volvo a beaucoup misé sur le marché américain.
Son image de robustesse et de sécurité, ses breaks spacieux font merveille outre-Atlantique.
On sait aussi que les défenseurs de l'ordre et de la morale aiment les coupés luxueux.
Ainsi, lorsque le probléme de la succesion de la P 1800 s'est posé et au moment où la série 140/160 a fait son apparition, les états majors de Göteborg ont pensé à dériver de cette dernière un coupé de grande classe doté d'une robe originale.
Baptisé P 172, ce projet dessiné pas Jan Wilsgaard n'a jamais dépassé le stade de la maquette échelle 1. En résumé, on pourrait dire que cette auto avait les proportions d'une De Tomaso Langchamp et l'élégance d'un coupé Fiat 130. Malheureusement, les finaciers ont jugé la mise en production de la P 172 périlleuse et l'idée d'un coupé propulsé par le 6 cylindres en ligne de la 164 a été mise au rencart. Obsédé par les normes américaines, Volvo a préféré équiper ses berlins parallèlipièdiques de pare-bœufs pour les jeter contre des murs de bêton. Le temps a passé, la série 140/160 due au même Jan Wilsgaard n'a cessé de se développer, muant en série 240/260 en 1974 jusqu'au jour où l'idée de coupé refait surface.


Top chopped

Histoire de féter ses 50 ans avec plus d'éclat, Volvo présente au Salon de Genéve 1977 la 262 C avec un C comme coupé. A premiére vue, on a envie de demander "Tu es née comme ça ou on t'a marché dessus ?" Jan Wilsgaard est, du moins officiellement, enthousiaste et content de lui. Il n'hésite pas à déclarer : "La 262 C est un auto qui a de la personnalité et un style intemporel. Je suis persuadé qu'elle tiendra sa place durant de nombreuses années".
Il faut reconnaître que le pére de la P 172 n'a pas eu beaucoup de liberté avec la 262 C. Il est tout simplement parti de la berline 264 ou plus exactement de sa variante américaine 2 portes, la 262. Histoire de changer de look, il a pris sa tronçonneuse pour découper le pavillon à hauteur de la ceiture de caisse, comme un roi du custom californien. Il s'est ensuite empressé de remodeler le tout avec une hauteur inférieure de 75 mm, un pare- brise plus incliné et des vitres arrière carrées de petite dimension, comme sur les premiéres Mercedes 250 CE. La touche finale a été apportée par un garnissage de toit en vinyle, une nouvelle calandre et des roues an alliage made in Italy. "Toutefois, je préfère l'intérieur" s'est empressé d'ajouter Wilsgaard et il a bien raison. Toute la sellerie est en cuir drapé et les panneaux de porte sont réhaussés de ronce de noyer. Du beau travail comme savent le faire les Italiens et pour cause.
La 262 C est construite par Bertone. On a malgré tout insisté sur le fait qu'elle a été dessinée en Suède même si l'on a tendance aujourd'hui à affirmer le contraire. Ce n"est pas vraiment un cadeau pour Nuccio Bertone.
Dans le cas de la 262 C, le carrosier de Grugliasco a surtout agi en qualité de sous-traitant, comme il l'avait fait en 1975 avec la limousine 264 TE.
Sous une apparence américanisée qui a presque fait école, la 262 C reprend toute la mécanique de la berline 264 avec, en premier lieu, le V6 PRV 2,6 litres que Volvo partage avec Peugeot et Renault.
Destination oblige, la transmission est presque exclusivement automatique, quant à la suspension, avec son essieu arrière rigide, elle n'a rien de choquant pour la clientéle visée.
La 262 C joue la carte de l'exclusivité et son équipement est ultra complet : vitres électriques, sièges chauffants, régulateur de vitesse et air conditionné sont au menu. Comme il se doit, la clientèle européenne a boudé la 262 C sand vraiment savoir ce qu'on lui vraiment savoir ce qu'on lui proposait. La majorité des 6622 voitures produites est allée en Amérique. Dix ans après, on trouve à la 262 C un charme incomparable et les collectionneurs se l'arrachent...

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Vraiment Bertone

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 La 780 est une création originale
 de Bertone qui ne partage aucun
 embouti avec la berline 760.
 La 262C est un bricolage
 déconcertant qui ne manque pas
 de charme et de personnalité.

Volvo a abandonné la production de la 262 C en 1981 avant même de lui donner une remplaçante. L'étude de cette dernière a pris tournure la même année et il a fallu attendre le Salon de Genève 1985 pour découvrir le résultat sous le nom de 780.
Une habitude a été prise, la 262 C était un dérivé de la 264, la 780 est tout naturellement un dérivé de la 760, l'actuelle 4 portes haut de gamma de la marque. De la même façon, Bertone a été choisi pour la construire mais l'on a cette fois écarté les demi-mesures.
Plus de bricolage, plus de style douteux cautionné bon gré mal gré par une griffe prestiqieuse. La 780 a véritablement été dessinée par Bertone.
Ah... bon. Nous dirons, si vous préférez, dessinée par Bertone sous la haute surveillance de Volvo. Résultat, une auto classique, élégante, harmonieuse, racée, équilibrée... que ressemble à tout et à rien.
"Il y a là-dedans de l'Alfa 90" disent les uns. "C'est une grosse Maserati Biturbo", disent les autres. Pour ma part, je dirais qu'lle est ce aue devrait être la 760 mais l'on me rétorquera qu'avec son profil taillé à la hache par un bûcheron (scandinave) la 760 est plus originale. J'ai déjà eu l'occasion de l'écrire, je ne fais pas de politique et ne souhaite pas avoir d'ennuis avec quiconque. Nous le verrons plus loin, la 780 est plus impressionnante à l'intérieur qu'à l'extérieur. Attention, ne vous méprenez pas sur mes propos. J'entends par intérieur habitacle et non entrailles mécaniques. Sur ce plan, la 780 est comme la 262 C mais en relief et en couleurs. On a toujours la même suspension avec le même essieu arrière rigide, mais la géomètrie a été revue tandis que les roues sont de plus grand diamètre et chaussées de pneumatiques taille basse. On a toujours le V 6 PRV mais dans sa nouvelle configuration avec vilebrequin à manetons décalés tout. On a toujour la boîte automatique Borg et Warner mais ave un overdrive en plus. Stop ! Je vois que ma méchanceté naturelle m'égare de nouveau. Comme la 262 C en son temps (mais pas chez nous), la 780 peut recevoir une boîte manuelle à 4 rapports avec overdrive (mais pas chez nous). Pour d'autres marchés, elle existe en 6 cylindres Turbo essense de 2,5 litre, 4 cylindres Turbo essence de 2 litres et même 6 cylindres Turbo Diesel. Et même que, j'veux dire, on pourrait nous aussi y avoir droit un jour (au diesel). Et cela vous fait rire ! Il y a des autos dont la lecture des caractéristiques et la découverte sur papier glacé ne provoque pas l'orgasme. C'est souvent le cas des Volvo.
Alors, le mieux est de les juger sur pièce, volant en mains. C'est ce que nous avons fait avec une 780 et une 262 C de 1980, c'est-à-dire 2,6 litres.


Introvertie et extravertie

Elles sont là, face à face, dorées sur tranche toute les deux. Nous ne reviendrons pas sur le style proprement dit. On remarquera simplement que la 780, qui a le volume d'une 760, est plus courte ( - 8,5 cm), plus large ( + 4 cm) et plus haute (+ 4,3 cm) que la 262 C, le tout sur unempattement plus long et des voies plus larges. Tout est normal, sauf la hauter. Ou la 780 est trop hautte, ou la 262 C est trop basse.
On sent bien que la 262 C est passée sous une porte sans baisser la tête mais elle ressemble bien à un coupé alors que la 780 a des faux airs de berline 2 portes.
Outre ces considérations du plus haut intérêt, deux détails méritent d'être spulignés. La 780 est plus lourde que la 262 C et la capacité de son coffre à bagages est nettement inférieure.
Un autre fait m'a aussi chagriné : la 262 C était munie de bavettes de caoutchouc derrière chaque roue alors que la 780 en est démunie.
Qui a dit que cela faisait chaudin ?
Venez donc faire un tour à l'intérieur, vous économiserez votre salive. Là encore, les différences flagrantes sont gommées par une multitude de petites similitudes. De toute évidence, la 780 est lumineuse, ouverte sur le monde, tant pour les passagers avont que pour les passagers arrière.

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Nouveau PRV (780) ou vieux PRV (262C),
les sensation sont les mêmes : souplesse avant tout.


La 262 C, elle, plisse les yeux.
Ses places arrière sont tout aussi spacieuses mais dissimulées aux regards indiscrets par la surface vitrée rétrécie.
L'ambiance est intime, je dirais même à la limite du lupanar. De par sa ceinture de caisse réhaussée, la 262 C est introvertie alors que la 780 est extravertie.
Dans la première, le conducteur se sent un brin écrasé, comme dans une auto-mitrailleuse.

  VOLVO 780

  Accélérations : (Automatisme intégral) ; 400m DA :17,6
  sec. ; 1000 m DA : 32,3 sec.
  Vitesse maxi : 191,2 km/h
  Consommation moyenne de l'essai : 15,9 l/ 100 km
  Poids réel contrôlé avec les pleins
  total : 1491 kg ; sur l'avant : sur l'arrière : 43 %
  Prix : 298 000 F (pas d'options)

  MEMENTO 262 C

  La 262 C été produite à 6622 exemplaires entre 1977 et 1981.
  En France, seulement 74 exemplaires ont été immatriculés. Les
  modèles 77, 78 et 79 sont de couleur argent avec vinyl noir.
  Seuls les tout premiers modèles sont munis de roues italiennes, le
  reste de la production ayant adopté les roues à bâtons de la 264.
  Les coupés livrés en 1980 sont de couleur or, sans toit vinyl. Ils
  sont également identifiables à leur poupe redessinée, avec un
  même année, en août. Les modèles 81 sont noirs et dotés de
  pare-chocs redessinés.


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L'habitacle de la 780 est encore plus luxueux que celui de la 262C.
Cette dernière se contente d'une planche de bord de série.

Dans la seconde, la vision est totale, sous tous les angles et même au plafond grâce au toit ouvrant transparent.
Les deux coupés reprennent les planches de bord de leur berline de base mais la 262 C reste au plastique alors que la 780 est maquillée de cuir et bois. Il est amusant de constater que le design global n'a pas considérablement évolué en dix ans. La forme des volants est très voisine, les leviers de commande de boîte sont identiques, c'est-à-dire perfectibles sur le plan ergonomique.
D'une voiture à l'autre, le progrès se mesure par la qualité de la finition et le niveau d'équipement. La 780 reçoit plus de bois et plus de cuir mais aussi des composants plastiques de meilleure qualité. C'est le cas par example des interrupteurs qui ne font pas arbre de Noël. Par contre, certains d'entre eux, ne sont pas repérés la nuit. C'est le cas des commandes de lève-glaces. Face aux fauteuils-club très américains de la 262 C, les sièges de la 780 sont nettement plus anatomiques. De plus, ils offrent une gamme de réglages étendue dont la plupart se font électriquement. La 780 est une auto de roi fainéant. Le déplacement des sièges avant pour accéder places arrière est assisté, le système de climatisation est pourvu d'une régulation automatique, la trappe à essence se commande depuis le tableau de bord... espérons que les camarades piémontais soigent le montage des câblages.


Silencieuse ou silencieuse ?

Mieux dessinée, mieux finie, la 780 devrait également être plus efficace que la 262 C sur la route. On a tant décrié l'ancien PRV que l'on ne peut que se réjouir de l'arrivée de sa nouvelle vesion. On a dit que le premier était bancal. Honnêtement, je n'ai pas ressento de nette différence en passant de la 262 C à la 780. Entre le vieux 2,6 litres et le nouveau 2,8 litres le gain de puissance est appréciable mais pour ce qui est couple, on repassera. Le PRV doté d'un vilebrequin à menetons décalés gagne presque 2 mkg mais cela se fait à 4 500 tr/mn, soit 1 500 tr/mn plus haut. Et que demande-t-on sur un gros coupé de 1 500 kg, qu'apprécie-t-on sur un gros coupé de 1 500 kg, qu'apprécie-t-on avant tout sur une américaine? Beaucoup de couple à bas régime. On peut dire que les deux V 6 procurent le même agrément, c'est-à-dire souplesse et silence. Pour ce qui est de la puissance, la différence n'est pas flagrante. N'oublions pas que la 780 est plus lourde et munie d'une transmission différente. Avec la 262 C, les choses sont simples. Le conducteur dipose de 3 rapports qu'il peut pousser jusqu'à 5 500 tr/mn en gardant le pied au plancher sans le moindre difficulté. Sur la 780, un kick- down volontairement récalcitrant ne vous aide pas à monter les 3 rapports + overdrive à 5 000 tr/mn, limite imposée en mode automatique. On ne sait quoi trop penser de cet overdrive qui est censé constituer un quatrième rapport. La commande de boîte est munie d'un petit interrupteur qui permet de commuter l'overdrive et lorsque celui-ci est en fonction, on a plutôt la sensation de passer directement de 2e en 3e "lonque". Résultat, on a toujours l'impression de tirer long et il est souvent nécessaire de commuter l'overdrive pour effectuer un dépassement ou avaler une côte avec plus d'aisance.
La ma nœuvre est rapide mais cet overdrive a plutôt l'air d'un bricolage, un artifice destiné à abaisser la consommation qui dépasse facilement les 15 litres aux 100, la capacité du résevoir à carburant est à peine suffisante. Notre 262 C d'essai étant munie d'un pont plus long que d'origine, il ne nous a pas été possible d'effectuer une comparason valable mais il nous semble que la 780 n'est pas moins vorace que la vieille 262 C.
Le pont long de notre 262 C faussant les données du problème, nous avons concentré nos mesures d'accéleration sur la 780. Là encore, le kick-down paresseux ne nous a pas facilité les choses. Après plusieurs tentatives de dressage, nous avons obtenu 17,6 secondes au 400 m départ arrêté et 32,3 secondes au 1 000 m.
Une bonne 2 litres à boîte méchanique fait mieux. En mode manuel, sans overdrive et en utilisant le régime maximum de 6 000 tr/mn, on peut facilement améliorer ces temps de 6 dixièmes de seconde. A ce même régime, la 1ere monte à 72 km/h compteur, la deuxième à 120 et la troisième (sans overdrive) à 180. Avec l'overdrive, on peut dire que la vitesse de pointe réelle est de 190 km/h. Il faut un certain temps pour chronométrer cette valeur mais à la faveur d'un faux-plat et d'une bonne lancée sur autoroute, la 780 dépasse nettement ce chiffre. Nous le savions dès le départ, le coupé Volvo n'est pas un café-racer. Il ne fait pas le secouer, il est fait pour les amateurs de ouate, les conducteurs paisibles qui prennent le temps de digérer des aliments saints et naturels à heure fixe. Il faut savoir laisser son casque et ses gants à trous-trous au vestiaire pour goûter aux joies de "climate" et de la stéréo. Il y a des moments où ce plaisir prend le dessus, la 780 sait vous le rappeler.



La 780 est pour l'instant un peu fade.
Quand elle aura pris de l'âge,
comme la 262C, elle aura plus de saveur.

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Juste un autobloquant, svp !

Le comportement routier de la 780 est sans histoire. Sa tenue de cap est excellente avec un sousvirage prononcé dans les courbes serrées qui ne devient gênant que lors-qu'on attaque, c'est-à-dire lorsque'on sort du registre d'utilisation de la voiture. Le confort de la suspension est excellent avec en contrepartie une tendance au roulis et aux variations d'assiette tout à fait normales. Notre seul véritable reproche concerne la motricité qui est insuffisante et il nous a été possible de constater sur 262 C qu'un auto-bloquant apportait un progrès très net et rendait la voiture plus vivante. Les freins de la 780 sont efficaces et endurants avec un ABS qui pardonne presque tout.


Dans les freinages d'urgence, le train arrière a tout de même tendance à se délester et bouger. La direction est quant à elle douce et précise, rien à dire.
En définitive, les qualités de la 780 ne peuvent se juger avec la froideur d'une pseudo technique ou à travers une séance de rodéo sur circuit. Le coupé Volvo se savoure avec modération, sensibilité et douceur sur de longs parcours, Cruise control bloqué sur 140 compteur, on va de Paris à Nice dans la plus grande décontraction. On oublie le démon du chronomètre, les tracasseries de la maréchaussée au volant d'une auto discrète qui arrive tout de même à attirer les regards, come tout symbole de luxe et de qualité.
Pour 300 000 F, on peut tout aussi bien acheter une Lancia Theme 8.32 ou une Venturi c'est-à-dire de l'exhubérance, des performances et beaucoup de stress en plus. La vie nést pas un Grand Prix, il convient de se le rappeler de temps à autre. Certes, la 780 manque un peu de saveur comme le nouveau millésimé d'un grand cru, mais ses acheteurs d'aujourd'hui feront le bonheur des collectionneurs de demain. Après l'avoir conduite, on se dit que l'on est encore jeune mais que plus tard... Gardez en mémoire l'example de la 262 C!




par Jean-François Marchet- Photos Patrick Sautelet '87.

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